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31/03/2011

LA MORT DU LOUP- par Jean Fusari


Un astre s’est éteint, un autre naîtra bientôt
Un soleil s’est tari dans un éclair puis rien
Rien que l’obscurité et son pauvre manteau
Endeuillé par l’écho d’un malheur qui vient


C’est la noirceur du monde qui tombe tout à coup
Poussant vers le néant les regards allumés
Comme autant de lampions noyés par le vent fou
Et les rires sur la plaine en murmures sont changés

On pourrait peindre des heures ce paysage désolé
On pourrait même vouloir sombrer dans ce désastre
Mais une seule couleur fade finit par faner
Même aux yeux suicidés, ignorés par les astres

Il manque dans toute cette ombre le mouvement

Même si bientôt l’œil las s’habitue mollement
A distinguer les formes, les arrêtes, les dunes
Et puis un peu après des silhouettes, la Lune

Au loin, une bête fragile, perdue et palpitante
Un loup sort du bosquet d’une démarche malhabile
Cherchant seul sur la plaine une autre âme aimante
Il titube, tourne en rond, trottine d’un air fébrile

Les forces l’ont quitté, sa quête inachevée
S’estompe peu à peu dans son esprit errant
Son ventre cruellement creux continue de couiner
Mais son grand regard jaune s’est levé implorant

Déjà il quitte ses rêves et ne cherche plus
Sur la plaine cette compagne qui tarde à venir
Et qui n’existe pas, et qui n’existe plus
Fixant maintenant la Lune ronde, il fait frémir

De larges naseaux qui aspirent la nature
Les collines, les buissons, l’herbe et même l’air
Dans un grand tourbillon toute la plaine s’épure
Le loup avale tout et tout se laisse faire

Ne restent qu’un arbre, la lune, et le sol invisible
La vue du loup se trouble, il se met à courir
La fatigue habille son visage d’un rictus terrible
Et sa tête emplie de terre, il commence à mourir

Trébuchant sur une large racine il tombe
Et ne pouvant se soulever il accepte le baiser
Du grand arbre qui pour le protéger se bombe
Recouvrant l’animal de ses branches emmêlées

Instant d’éternité, sentiment d’être aimé
Caressé par son arbre il sent sa fin venir
Ce qu’il a cherché longtemps, le voici donc planté
Au milieu du grand rien où tout va se finir

Profitant d’un maigre regain offert par son arbre
Il plante dans la Lune les graines de ses yeux
Et pousse dans le ciel un hurlement heureux
Dans un dernier craquement le loup devient de marbre

Et l’arbre ruisselant pleure son enfant heureux

Puis, comme à chaque fois que la nuit est trop sombre
Une aube vient se lever et restaure la nature
Sans un mot la lumière balaye toutes les ombres
Tout s’oublie facilement dans la clarté future


Jean Fusari



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